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LES FRANCS TIREURS

les laisser tomber à la mer leurs avirons dont le portage avait été garni de laine, afin d’étouffer autant que possible le bruit de la nage et de déjouer la vigilance des Mexicains.

— C’est bien, mes enfants, dit le capitaine après avoir jeté un regard satisfait sur ces préparatifs ; partons ! Surtout, père, ajouta-t-il en se tournant vers maître Lovel, fais bonne guette ! Si à quatre heures du matin, au quart de diane, nous ne sommes pas de retour à bord, laisse porter au large, sans t’occuper de nous davantage ; car il serait inutile de nous attendre plus longtemps, parce que nous serions prisonniers des Mexicains, et une plus longue station dans ces parages compromettrait la sûreté du navire. Au revoir, et courage ! j’ai espoir que nous réussirons.

Et après avoir serré amicalement la main du vieux marin, il descendit dans le canot, s’assit à l’arrière auprès de Tranquille qui l’y avait précédé, saisit la barre du gouvernail et dit à voix basse ;

— Pousse !…

À ce commandement, l’amarre qui retenait la chaloupe fut larguée, les avirons tombèrent ensemble à la mer et le canot déborda.

Lorsqu’il eut disparu dans la brume, maître Lovel courut à toutes jambes à l’arrière du brick, et, se penchant au dehors :

Es-tu là ? demanda-t-il.

— Oui, répondit-on d’une voix étouffée.

— Sois paré, répondit le maître ; et, s’adressant à un vieux matelot qui l’avait suivi : Tu sais ce que je t’ai recommandé, Wills, lui dit-il ; je compte sur toi, et je te confie le navire.