Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/40

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— Eh, oui ! répondit celui-ci en riant ; entre donc, Bernardo, mon vieux camarade !

Le montagnard ne se fit pas prier ; il franchit joyeusement le seuil et tomba dans les bras de son ami, qui était venu à sa rencontre.

La reconnaissance, ainsi entamée, se continua, et se compléta rapidement, tout en déjeunant de compagnie, car Julian avait exigé que Bernardo partageât son déjeuner ce que le jeune montagnard avait accepté sans se faire prier.

On causa du temps passé, des anciens camarades ; on réveilla mille souvenirs assoupis au fond des cases secrètes de la mémoire ; en somme, on parla de tout et de tous le verre en main, et en buvant à la santé des vieux amis ; le nom de Denisà fut prononcé par Bernardo, avec les plus grands et les plus sincères éloges.

Ce nom jeté à l’improviste dans la conversation fut la traînée de poudre qui fait sauter la mine ; le cœur de Julian battit sans qu’il sût pourquoi ; soudain il se rappela la charmante enfant, qui pendant si longtemps avait partagé ses jeux, ses joies et jusqu’à ses douleurs d’enfant.

Les Mendiri et les d’Hirigoyen étaient très liés à cette époque déjà éloignée ; ils vivaient presque ensemble, étant toujours les uns chez les autres ; les enfants ne se quittaient pas ; Julian appelait Denisà sa petite femme, et Denisà le nommait son petit mari. Le jeune homme se rappelait leurs enfantins projets d’avenir, lorsque, la main dans la main, ils couraient ensemble la campagne, cueillant des fleurs dans les haies et dans les champs, poursuivant les papillons et dénichant des nids de rouges-gorges et de fauvettes. Ces souvenirs charmants brusquement ravivés, Julian se sentit pris d’un vif désir de revoir sa petite compagne, maintenant, au dire de Bernardo, changée en une adorable jeune fille que tout le monde aimait et admirait.

Le jour même, Julian, accompagné de Bernardo, se rendit au village.