Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/130

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liberté de Sebastian, que vous saviez être prisonnier dans l’hacienda.

— En effet, j’avais été informé de cette arrestation par un peon qui avait tout vu par hasard. Malheureusement, cet imbécile ne put réussir à me fixer le jour exact où Sebastian avait été fait prisonnier ; cependant, je me décidai à faire quelque chose en sa faveur. Si j’avais su alors ce que je sais maintenant, je me serais bien gardé de tenter cette malheureuse démarche.

— Et Masamora vivrait encore.

— Peut-être ; chaque homme a sa destinée écrite d’avance sur le grand-livre de la fatalité !

— Cela est possible, après tout. Bref, il paraît que Masamora fut introduit dans l’hacienda, que là il s’était pris de querelle avec le Cœur-Sombre, et que même il avait essayé de jouer du couteau ; mais le chasseur qui, paraît-il, possède une vigueur remarquable, lui asséna un si furieux coup de poing dans l’estomac, qu’il le lui défonça ; puis, après qu’on eut fait reprendre connaissance à ce pauvre diable à demi assommé, sur l’ordre du Cœur-Sombre il avait été remis sur son cheval et chassé de l’hacienda. Masamora rejoignit ses compagnons comme il put, au bout de deux jours. Ceux-ci, le croyant mort, allaient retourner au camp, lorsqu’il arriva à l’endroit où ils l’attendaient ; mais après avoir pris à peine une heure de repos, bien que sa faiblesse fût extrême, Masamora voulut absolument se remettre en route ; son cheval était difficile, et comme il le guidait mal et le tourmentait sans trop savoir ce qu’il faisait, l’animal impatienté fit un saut de mouton et le lança par-dessus sa tête dans une fondrière ; cette dernière mésaventure l’acheva, car il trépassa sans avoir repris connaissance, pendant que l’on me donnait les renseignements que je vous transmets. Je donnai l’ordre de creuser une fosse, où on l’enterra ; cela fait, comme rien ne nous retenait plus à cette place, on se remit en route pour le camp : voilà tout ce qui s’est passé. Comme vous le voyez, ce n’est pas grand’chose, ou, pour mieux dire, ce n’est rien.