Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/289

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ajouta-t-il en appuyant, avec une évidente intention sur ce mot.

— Vous me connaissez, monsieur ?

— Certes, monsieur, et beaucoup mieux que vous ne croyez me connaître, car vous ne savez rien de moi ; et quoi que vous fassiez, vous n’en saurez jamais davantage, par la seule raison que je n’ai jamais eu de confident et n’en aurai jamais, répondit-il nettement. Cessons donc, croyez-moi, ces inutiles escarmouches, qui n’auraient d’autre résultat que de nous aigrir l’un contre l’autre. Vous avez besoin de moi ; peut-être, de mon côté, ai-je besoin de vous ; débattons notre marché franchement et clairement, comme deux marchands qui traitent une affaire intéressante pour eux. Plus tard, nous verrons quelles conditions nous poserons à notre mutuel avantage.

— Soit, monsieur, reprit l’autre avec une joie trop expansive pour être réelle ; voilà ce que j’appelle parler d’or. Je commence ; je tiens à vous donner l’exemple de la franchise.

Le Loupeur sourit.

Il se leva, s’approcha de la table et choisit un cigare avec soin dans la boîte placée près de son énigmatique interlocuteur.

Il coupa avec un canif le bout du cigare, l’alluma, alla s’étendre sur le canapé dans la pose la plus confortable ; et il dit, entre deux bouffées de fumée :

— Allez, maintenant, je suis tout à vous.

M. Romieux rougit de cette étrange désinvolture ; cependant il ne protesta pas ; seulement il se mordit les lèvres jusqu’au sang.

Puis il commença :

— Vous êtes, n’est-ce pas, un des principaux chefs de l’armée roulante ?

— Je me nomme le Loupeur, répondit-il négligemment.

— Ce qui veut dire ?

— Que je ne suis pas un des principaux chefs, mais