Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/316

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— Il le sera, je t’en réponds. Le diable m’emporte s’il ne se croira pas à sa chère Florida !

— Tant mieux si cela est ainsi. Se trouvant bien, il restera plus longtemps avec nous.

— C’est pardieu vrai ! je n’y avais pas songé. Veux-tu visiter l’hôtel avant son arrivée ?

— Certes. Mais nous avons du temps devant nous ; ils n’arrivent qu’à quatre heures. Ils ont commandé un train particulier. Ils ont je ne sais combien de wagons de bagages ; ils amènent avec eux jusqu’à des mustangs des prairies.

— Bonnes bêtes ; cela me fera plaisir de les revoir.

— De qui parles-tu ? dit Julian en riant ; des gens ou chevaux ?

— Je parle des mustangs, caraï ! Tu sais combien j’aimais le mien, mon pauvre Negro ! Et toi, où en es-tu ?

— J’ai complètement terminé aussi ; mais il est temps que tout cela finisse. Ma femme est furieuse contre moi ; tous ces mystères lui agacent les nerfs au plus haut degré. Tout à l’heure, quand je l’ai quittée, elle avait presque les larmes aux yeux. J’ai été sur le point de tout lui avouer tant j’étais peiné.

— Pauvre chère Denizà ! elle doit en effet être bien malheureuse. Elle n’est pas accoutumée à toutes ces cachotteries ; aussi je me suis bien gardé d’aller la voir ; si elle m’avait interrogé de sa douce voix, je crois que je n’aurais pas eu le courage de me taire, et que je lui aurais tout dit malgré la promesse que je t’ai faite.

— Je te reconnais bien là, poltron ! dit gaiement Julian en vidant son verre et le reposant sur la table ; tu sais que nous comptons sur ta femme ce soir ?

— Je le lui ai dit, elle arrivera à six heures et demie ; c’est bien l’heure n’est-ce pas ?

— Oui, elle ne sait rien ?

— Pas un mot ; d’ailleurs, avec elle, il est facile de ne rien dire ; elle n’interroge jamais ; elle sait que lorsque je sors c’est presque toujours pour aller te voir, cela lui suffit.