Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/396

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— Que je considérerai cette chute comme une jonglerie habilement exécutée, voilà tout.

— Oh ! pouvez-vous parler ainsi ? murmura Felitz Oyandi, dont le regard ne quittait plus la glace.

Le Mayor haussa les épaules, se leva et alla choisir un cigare dans la boîte posée sur le bureau.

— Croyez-moi, mon camarade, dit-il, tout en allumant le cigare qu’il avait choisi : nous ne sommes pas assez bien notés dans le ciel pour que le bon Dieu se soucie de nous et s’amuse à faire des miracles en notre faveur et à nous crier : Casse cou !

En ce moment, trois coups furent vigoureusement appliqués sur la muraille.

— Qu’est cela ? demanda le Mayor, est-ce que vous attendez quelqu’un ? Cela a l’air d’un signal.

— Je n’attends personne, balbutia Felitz Oyandi en frissonnant.

— Alors, ce sont les trois coups frappés par le régisseur derrière la toile, dit le Mayor en riant. La farce va commencer. Attention !

— Comment pouvez-vous parler ainsi dans une circonstance aussi terrible ? reprit Felitz Oyandi, dont les dents claquaient de terreur.

— Mort diable ! je n’ai jamais vu animal aussi poltron que vous ! Je rirais bien si le diable vous tordait le cou !

— Oh ! fit l’autre, dont la terreur croissait à chaque seconde ; regardez ! s’écria-t-il en montrant la glace.

Elle oscillait lentement.

Tout à coup, le premier coup de midi se fit entendre.

— Prenez garde ! prenez garde ! s’écria Felitz Oyandi en tombant à genoux.

Le Mayor se recula nonchalamment, tout en continuant à fumer.

— Eh bien ! cela ne va donc pas ? dit-il, en ricanant.

Soudain, la glace pencha en avant et tomba avec fracas sur le plancher.

Felitz Oyandi poussa un cri terrible et s’abattit la face contre terre.