Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/112

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— Oui, murmura Bernard, se parlant bien plus à lui-même que répondant au chasseur ; il y a au fond de cette sombre affaire quelque chose de mystérieux et de terrible qui me glace le cœur ; l’auteur de ce guet-apens odieux doit, quel qu’il soit, disposer d’une immense puissance. Si c’est l’homme que je soupçonne… Il s’interrompit. — Le comte Armand ? reprit-il après un instant.

— Depuis quatre jours, il a quitté Paris pour se rendre à Dauville, où il doit passer quelques jours. Il est bien heureux que M. Armand ne se soit pas trouvé à l’hôtel, le pauvre jeune homme serait devenu fou de désespoir ! Ignoriez-vous donc son absence, monsieur Bernard ?

— Sur ma foi ! je ne sais vraiment où j’ai la tête ! s’écria Bernard avec colère, je connaissais, en effet, le départ du comte Armand. Comme vous le dites, ami Charbonneau, c’est véritablement un bonheur qu’il ne soit pas ici. Est-ce Julian qui vous a envoyé chez moi ?

— Oui, monsieur Bernard ; il paraît que madame la comtesse est en proie à des crises nerveuses affreuses ; M. Julian est comme fou. J’ai prononcé, par hasard, votre nom devant lui ; il s’est frappé le front, et il s’est écrié : « Je ne suis plus bon à rien, ma tête se perd ! Charbonneau, courez en toute hâte chez Bernard, instruisez-le du malheur qui nous frappe tous. Qu’il vienne tout de suite ! Lui seul peut nous sauver ! »

— Je l’essaierai du moins, murmura Bernard en hochant la tête.

— J’ai fait atteler un coupé, continua le chasseur, j’ai mis deux revolvers dans mes poches en cas d’accident ; je me suis fait accompagner par un valet de pied, armé jusqu’aux dents, ainsi que le cocher, et je me suis fait conduire ici le plus rapidement possible.

— Très bien ! je reconnais là vos vieilles habitudes de chasseur, ami Charbonneau ; où la voiture nous attend-elle ?

— À cinquante pas d’ici, sur la chaussée du Maine, au coin de la rue de la Sablière.

— C’est fort bien ; je vais reprendre ma redingote. Dans