Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/178

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entrait, ou bien si elle l’attendait au contraire dans la voiture. Il me semble, messieurs, que ce détail, si indifférent qu’il paraisse au premier abord, peut avoir plus tard son importance.

— Une très grave même, dit Bernard ; je ne comprends pas que nous n’y ayons pas songé plus tôt, et, se tournant vers les domestiques : Vous avez entendu la question de monsieur, ajouta-t-il, rappelez bien vos souvenirs, et répondez.

— Monsieur, répondit le valet de pied après un instant de réflexion, pendant le cours des visites que nous avons faites, mademoiselle Gordon n’est descendue que trois fois : rue Balzac, rue du Cirque et rue du Rocher. Je me souviens que, pendant chaque arrêt de la voiture, tandis que mademoiselle Gordon restait seule, elle se penchait tantôt à la portière de droite, tantôt à celle de gauche, dont elle s’empressait de baisser les glaces aussitôt que mademoiselle de Valenfleurs était descendue ; elle regardait ou plutôt examinait curieusement les passants. Je me souviens surtout que lorsqu’on arriva devant le n° 36 de la rue des Acacias, aux Ternes, mademoiselle de Valenfleurs dit à sa demoiselle de compagnie, au moment de descendre : « Ici, ce n’est pas la peine que tu viennes avec moi, je n’en ai que pour un instant. » Mademoiselle Gordon insista pour l’accompagner ; alors, mademoiselle Vanda lui dit en riant : « Viens donc, méchante entêtée, puisque tu l’exiges absolument. »

— Je crois que mademoiselle Vanda cause toujours en anglais avec sa demoiselle de compagnie, interrompit Bernard. Vous conaissez donc cette langue, ami Benoît ?

— Monsieur, répondit le valet de pied, bien que d’origine française et normande, ma famille est depuis longtemps établie au Canada. Je suis né aux Trois-Rivières, où l’on parle presque autant l’anglais que le français.

— C’est très juste, mon ami. Je tenais à vous faire cette