Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/203

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— La ! maintenant, nous sommes chez nous, et nous pouvons causer à notre aise, sans craindre d’être entendus, dit-il d’un air nonchalant en reprenant sa place ; causons donc sans plus de retard, s’il vous plaît.

— C’est à vous à parler, monsieur, et non pas à moi, répondit le nouveau venu en langue espagnole.

Le Loupeur le regarda avec une indicible expression de raillerie.

— Mon ami comprend le français, mais il ne le parle pas, se hâta de dire le Manchot.

— Tiens ! tiens ! tiens ! fit le Loupeur en riant, je ne m’attendais pas à celle-là ; mais cela ne nous empêchera pas, je l’espère, de nous entendre : je parle toutes les langues, moi, même le basque, ajouta-t-il avec intention, et s’il plaît au marquis de Garmandia de…

Il n’acheva pas.

— Misérable ! s’écria le Mayor, en se débarrassant de son manteau en un tour de main, et se ruant sur lui le poignard levé ; tu ne vivras pas assez pour répéter ce nom !

Mais cette fois le terrible Mayor, car c’était bien lui, se trouva devant un adversaire plus redoutable qu’il ne l’avait supposé en voyant l’apparence presque délicate du chef de l’armée roulante.

En moins d’une minute, il fut désarmé, acculé à la muraille et sentit la pointe de son propre poignard sur sa poitrine.

— Bas les pattes, bandit ! lui dit le Loupeur d’une voix railleuse, c’est toi qui vas mourir, si tu fais un geste, un seul !

— Arrêtez ! s’écria le Manchot, en faisant un mouvement pour se lever.

— Toi, vipère ! reprit le Loupeur, si tu bouges, je te tue comme un chien !

L’autre retomba assis sur son banc, tremblant et claquant les dents.

— Ah ! mes maîtres, vous avez voulu jouer ce jeu-là avec moi, reprit le Loupeur avec un accent plein d’amer-