Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/244

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Bernard sourit sans rien répondre.

— Peut-être, monsieur, répondit le comte, pour lequel ce sourire n’était point passé inaperçu ; à l’époque où M. Zumeta et moi nous habitions l’Amérique, nous nous sommes livrés, dans les savanes, à des recherches bien autrement difficiles, n’est-ce pas, messieurs ? et pourtant, vous le savez, ces recherches ont toujours été couronnées de succès.

— Je ne dis pas non, monsieur le comte, répondit le policier avec une certaine roideur ; mais chaque pays a ses coutumes : Paris ne ressemble nullement aux déserts dont vous parlez ; les moyens dont vous vous serviez en Amérique seraient d’une exécution impossible en France ; les finesses de Bas-de-Cuir et des autres batteurs d’estrade dont les romanciers nous racontent les merveilles, seraient bientôt déjouées et réduites à néant par nos bandits parisiens. Du reste, interrogez M. Zumeta ; il a été, dit-on, coureur des bois, et l’un des plus adroits, vous verrez quels renseignements il vous donnera, ajouta-t-il avec une pointe presque imperceptible d’ironie.

— C’est ce que je vais faire avec votre permission, monsieur, dit vivement le jeune comte. Et s’adressant alors à Bernard : Parlez, je vous prie, mon ami, ajouta-t-il, vous avez sans doute quelque chose d’intéressant à nous révéler ?

— Je le crois, mon cher comte, répondit Bernard avec bonhomie. Mais vous me permettrez de faire observer à monsieur Bonhomme, avant toutes choses, que si chaque pays a ses coutumes, ces coutumes, lorsqu’elles sont bonnes, doivent être employées partout par les hommes intelligents, sans faux amour-propre, et surtout en oubliant cette suprématie imaginaire que les Français se figurent à tort posséder sur les autres nations, et leur fait ainsi commettre des fautes graves et parfois irréparables, lorsqu’au contraire nous ne sacrifions que trop habituellement, pour notre malheur, à la routine. Pour le cas présent, M. Bonhomme a procédé d’après les principes adoptés depuis longues années par l’administration de la police. Il devait échouer ; c’est ce qui est arrivé.