Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris III.djvu/337

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Le temps pressait ; d’un moment à l’autre ses ennemis pouvaient survenir eux aussi.

Le Mayor monta dans la voiture et fit son marché avec le cocher sans remarquer, et peut-être même sans les voir, des gamins jouant sur un tas de sable au roi détrôné, à deux pas de la voiture, sur le bord du trottoir.

Si le Mayor n’avait pas été si effaré par la crainte de tomber entre les mains de ceux qu’il fuyait et s’il avait su prendre patience quelques minutes encore, il aurait certainement rencontré un de ces coupés le plus souvent sans numéros auxquels on donne le nom de maraudeurs et même de rôdeurs, qui jamais ne s’arrêtent aux stations réglementaires et ne chargent qu’en marchant ; il n’aurait en alors à redouter ni les curieux ni les écouteurs.

Cependant, en arrivant à la rue de Rennes, ses nerfs étant un peu calmés et son esprit par conséquent plus lucide, le Mayor se ravisa.

Il arrêta le cocher, lui donna les cinq francs promis et descendit.

À quelques pas plus loin, il monta dans une autre voiture, qu’il prit à la station du chemin de fer.

Il quitta cette seconde voiture sur la place du Palais-Royal ; il en prit alors une troisième par laquelle il se fit conduire, non pas au coin de la rue des Écuries-d’Artois et du faubourg Saint-Honoré, mais à l’angle de la rue de Berri et des Champs-Élysées.

Mais la faute était commise, l’homme par lequel il était chassé était trop fin pour se laisser tromper par ces ruses enfantines.

Mais, heureusement pour le Mayor, Bernard, qui depuis qu’il était monté en voiture, n’avait pas desserré les dents, tressaillit tout à coup et, arrêtant le cocher :

— Retournez, lui dit-il, et allez au pas jusqu’à l’église, en suivant le milieu de la chaussée.

Le cocher obéit.

Bernard, après avoir recommandé d’un signe à ses compagnons de garder le silence, sauta à terre et se mit