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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

rible, relève-toi et remercie Dieu d’avoir échappé cette fois encore à ma vengeance. Ouvrez la porte, Carmela.

La jeune fille obéit.

— À cheval, continua le Jaguar, allez m’attendre au Rio-Seco, surtout que nul ne bouge avant mon arrivée, sous peine de mort, allez !

Les trois hommes baissèrent la tête et sortirent sans répondre : un instant plus tard on entendit retentir sur le sable du chemin le galop de leurs chevaux qui s’éloignaient.

Les deux jeunes gens demeurèrent seuls dans la venta.

Le Jaguar s’assit devant la table où un moment auparavant buvaient les trois hommes, cacha sa tête dans ses mains et sembla se plonger dans de sérieuses réflexions.

Carmela le considérait avec un mélange de timidité et de crainte, sans oser lui adresser la parole.

Enfin, après qu’un assez long laps de temps se fut écoulé, le jeune homme releva la tête et regarda autour de lui comme s’il s’éveillait d’un profond sommeil.

— Vous êtes restée là ? lui dit-il.

— Oui, répondit-elle doucement.

— Merci, Carmela, vous êtes bonne, vous seule m’aimez, lorsque tous me haïssent.

— N’ai-je pas raison ?

Le Jaguar sourit tristement, mais il répondit à cette question en en adressant une autre, tactique habituelle des gens qui ne veulent pas dévoiler leur pensée.