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LES RODEURS DE FRONTIÈRES

— Mais rien, mon père, répondit-elle en essayant de sourire.

— Fillette, fillette, murmura-t-il, tout cela n’est pas clair ; je ne suis qu’un pauvre chasseur, bien ignorant des choses du monde, mon esprit est bien simple ; mais je t’aime, enfant, et mon cœur me dit que tu souffres.

— Moi ! s’écria-t-elle avec un geste de dénégation, mais tout à coup elle fondit en larmes, et se laissant aller sur la loyale poitrine du chasseur, elle cacha sa tête dans son sein et murmura d’une voix étouffée : Oh ! père ! père ! je suis bien malheureuse !

Tranquille, à cette exclamation arrachée par la force de la douleur, se redressa comme si un serpent l’avait piqué, son œil étincela, il couvrit la jeune fille d’un regard plein d’amour paternel, et l’obligeant avec une douce contrainte à le regarder en face :

— Malheureuse ! toi, Carmela ? s’écria-t-il avec anxiété, que s’est-il donc passé, mon Dieu !

Par un effort suprême, la jeune fille parvint à se calmer, ses traits reprirent leur mansuétude ordinaire, elle essuya ses larmes et souriant au chasseur qui la considérait avec inquiétude :

— Pardonnez-moi mon père, lui dit-elle d’une voix câline, je suis folle.

— Non ! non ! répondit-il en secouant deux ou trois fois la tête, tu n’es pas folle, mon enfant, seulement tu me caches quelque chose.

— Mon père ! fit-elle en rougissant et en baissant les yeux d’un air confus.

— Sois franche avec moi, fillette, ne suis-je pas ton meilleur ami ?