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stridente, en se penchant sur le cou de son cheval et lui enfonçant l’éperon au flanc.

— Ah ! Santiago ! Santiago ! s’écrièrent les Californiens en poussant le cri d’appel accoutumé des ginetes.

Toute la troupe partit comme emportée par un tourbillon.

Il était onze heures du soir.

À neuf heures du matin, la caravane atteignit les premières maisons de la ville de San-Francisco, sans avoir un seul instant ralenti sa course vertigineuse à travers tous les obstacles.

Pas un cheval n’avait bronché.

— Hein ! s’écria le señor don Benito avec un orgueilleux sourire, quand je vous disais, madame la comtesse, que c’étaient de nobles et vaillantes bêtes !


XIII

OÙ L’ON VOIT QUE, SI L’AMOUR EST AVEUGLE, SOUVENT SES TEMPLES SONT BORGNES

Trois heures environ avant l’arrivée de la comtesse de Casa-Real et de sa suite, c’est-à-dire vers six heures du matin, une autre troupe beaucoup plus nombreuse que la sienne, et amenant avec elle cinquante ou soixante chariots et wagons chargés de marchandises de toutes sortes, était entrée à San-Francisco.

Cette première troupe était commandée par le comte de Warrens en personne, qui, en mettant le pied dans la ville, ne se nommait plus, ainsi que nous l’avons fait observer plus haut, que Master-Key ; messieurs le baron de San-Lucar, le vicomte de Rioban et le vicomte René de Luz, galopaient à ses côtés, suivis de près par nos vieilles connaissances, la Cigale, Mouchette et Filoche, et le reste des aventuriers.

Les Compagnons de la Lune avaient à l’improviste levé leur camp et abandonné définitivement le placer.

Les aventuriers s’arrêtèrent d’abord à Portsmouth square.

Sur la place même trois hommes attendaient impatiemment le comte de Warrens.

Ces trois hommes étaient le colonel Martial Renaud, qui avait été expédié en avant, sir Harry Mortimer et le baron d’Entragues, arrivé directement de France depuis deux jours seulement.

La troupe se sépara.

Les Compagnons de la Lune se dispersèrent aussitôt dans toutes les directions.

Les pauvres diables avaient hâte de goûter enfin à ces plaisirs, dont ils étaient sevrés depuis si longtemps.

Mais le capitaine savait où les trouver en cas de besoin.