Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/132

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passa le porte-voix à l’Olonnais, dont le quart commençait à huit heures, pour se terminer à minuit.

Selon la coutume invariable des marins à chaque changement de quart, le jeune homme demanda à l’officier qu’il remplaçait, s’il y avait du nouveau.

— Rien ; répondit un peu sèchement celui-ci en se dirigeant vers l’écoutille de l’arrière ; le vent adonne ; la route est toujours indiquée à l’E. S. E.

— Je le sais, monsieur, répondit l’Olonnais, avec insistance, aussi n’est-ce pas cela que j’ai l’honneur de vous demander ?

— Que voulez-vous donc alors, monsieur ? Hâtez-vous, je vous prie, il me faut inscrire mes observations de quart sur le livre de loch.

— Je désire, monsieur, connaître la position exacte du navire qui a été aperçu au coucher du soleil par la hanche de tribord, je crois ?

— C’est juste, un bâtiment a été en effet aperçu, répondit le comte d’un air indifférent ; mais à peine la vigie l’a-t-elle eu signalé qu’il a piqué dans le vent ; depuis plus d’une heure il est invisible.

— C’est égal, peut-être serait-il bon, monsieur, de se tenir en garde ; nous sommes sur le passage des vaisseaux espagnols, qui vont en Amérique ou qui en reviennent ; ces parages sont très-surveillés par leurs croiseurs.

— C’est possible ; mais rassurez-vous ; monsieur, le bâtiment que nous avons vu et que j’ai soigneusement examiné, n’est ni un vaisseau espagnol allant aux Indes ou en revenant, ni un croiseur ; c’est un honnête charbonnier, un peu gros peut-être, dont la construction est essentiellement marchande et l’allure lourde et pacifique ; il ressemble à une galiote hollandaise et marche comme une baille à braie ; du reste, faites comme il vous plaira ; vous êtes maintenant chef de quart, cela vous regarde. Allons ! bonsoir, lieutenant, je vous laisse ; M. le duc de la Torre m’attend, bonsoir !

Après avoir prononcé ces paroles avec un accent