Pitrians, demandé au capitaine Vent-en-Panne par le capitaine Guichard, avait obtenu de retourner à bord du Coq où il avait été aussitôt promu au grade de deuxième lieutenant ; fonctions laissées libres par l’Olonnais, qui avait naturellement remplacé le comte, en qualité de premier lieutenant.
Ce fut Pitrians que le jeune homme chargea de surveiller la conduite du comte ; en lui recommandant une vigilance d’autant plus grande, que depuis deux ou trois heures le prisonnier affectait une insouciance complète ; mangeait et buvait de bon appétit et semblait avoir entièrement pris son parti de ce qui lui était arrivé. Il était évident que le comte jouait un rôle ; qu’il ruminait une vengeance : il était donc urgent de suivre attentivement ses moindres mouvements.
Pitrians accepta la mission que lui confiait son ami ; il se fit le gardien invisible quoique attentif du prisonnier.
Deux ou trois jours s’écoulèrent, sans apporter de changements dans la position de nos personnages.
Le comte n’avait quitté le canot qu’il habitait, que pour aller à trois reprises différentes s’enfermer dans sa cabine, où il n’était resté chaque fois que quelques minutes, dans l’intention sans doute, de prendre certains objets dont il avait besoin ; mais il réussit à si bien dissimuler ces objets, qu’il fut impossible aux regards les plus clairvoyants de les apercevoir. Du reste cela importait peu.
Deux ou trois fois, le noble passager avait voulu monter sur le pont avec sa femme et sa fille, pour respirer un peu d’air pur et rafraîchissant ; ce qui est un véritable besoin sous ces chaudes latitudes, où l’on étouffe réellement entre les ponts ; mais il avait toujours été contraint de redescendre et de demeurer chez lui, à cause des salutations ironiques et des regards étranges, que lui adressait le comte Horace.
L’équipage et les passagers du Coq, étaient en proie à un malaise général ; chacun sentait à part soi, que cet état