Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/21

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blessures ; près de succomber ; sans autre espoir que la mort, s’il tombe aux mains de ceux qui le pressent et qui ne lui feront pas de grâce ; car, tout en fuyant, il a tué trois des leurs, et grièvement blessé un quatrième ; cet homme est providentiellement sauvé par un inconnu, qui s’élance d’un taillis, bondit sur les archers et les met en fuite, après une lutte opiniâtre qui ne dure pas moins d’un quart d’heure, et dont il ne sort vainqueur qu’au prix d’une blessure profonde au bras droit ; ce jeune homme, étendu sur la route, presque sans vie, est relevé par l’inconnu qui, malgré sa blessure, le charge sur ses épaules, et, après avoir fait des efforts gigantesques, et failli tomber épuisé lui aussi, le transporte dans un château voisin ; château habité par sa mère, sa jeune sœur et quelques domestiques. Là, les soins les plus délicats sont prodigués au jeune homme ; on lui offre l’hospitalité la plus grande, et, pour le soustraire aux recherches, on l’établit dans la chambre secrète du château. Deux jours après ces événements, la maréchaussée se présente ; le jeune homme si noblement recueilli, est un criminel d’État ; sa tête est mise à prix ; son sauveur apprend alors son nom, qu’il n’a pas voulu lui demander ; une haine implacable sépare les deux familles ; elles sont ennemies irréconciliables ; la pensée d’une vengeance facile et d’une trahison ne traverse pas, une seconde, l’esprit de l’homme qui a reçu son ennemi sous son toit ; les archers fouillent le château du haut en bas, et se retirent enfin, désappointés parce qu’ils n’ont rien découvert. Comment le héros de cette histoire a-t-il reconnu la grandeur d’âme de son sauveur ? Par une lâche et infâme trahison, en séduisant la sœur de l’homme auquel il devait la vie ; cette jeune fille pure, innocente, dévouée, était chargée, avec sa mère, de veiller sur le blessé, de le soigner ; car on n’osait mettre personne dans la confidence ; tour à tour, jamais ensemble, de crainte d’éveiller les soupçons, la mère où la fille se rendaient dans la chambre secrète, et portaient des consolations au blessé ; ce fut pendant