Page:Aimard - Les rois de l'océan, 1 (L'Olonnais).djvu/222

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après avoir chargé sur ses épaules les agrès de la pirogue, il se rendit tout droit à une taverne dans laquelle il entra et dont il ne sortit plus.

Quand Bothwell se crut bien certain de ne pas être surveillé, il obliqua sur la gauche, et après s’être orienté pendant deux ou trois minutes dans l’obscurité, il sembla reconnaître le point vers lequel il voulait si diriger, et il marcha vers une lumière, brillant comme une étoile dans une position complétement isolée, éloignée de quatre ou cinq cents toises des dernières maisons du village.

Plus il se rapprochait de cette lumière, plus elle grandissait ; bientôt elle fut assez intense pour lui permettre de distinguer, à une assez courte distance devant lui, une maisonnette, à demi enfouie sous les hautes ramures de fromagers et de liquidembars centenaires et entourée d’une haie vive de cactus-vierges, très-serrés les uns contre les autres.

— Je ne me suis pas trompé, c’est bien ici, murmura-t-il ; allons, il n’y a plus à hésiter.

Il doubla le pas et presque aussitôt il s’arrêta devant une porte pleine, qu’il poussa, mais contrairement aux habitudes simples du pays, cette porte était fermée par une serrure solide et probablement maintenue au dedans par une barre, car elle ne bougea pas.

— Recommence un peu à pousser comme ça, mon homme, et tu vas recevoir une prune dans la caboche ; dit une voix goguenarde, derrière la haie.

— Tiens ! c’est toi, Danican ! s’écria le flibustier, tant mieux !

— Le capitaine ! fit Danican, espèce de colosse aux traits hâves, émaciés par la misère et la débauche ; et il s’empressa d’ouvrir.

— Merci, dit Bothwell, en examinant les haillons sordides dans lesquels se drapait le géant et dont il avait la prétention de se couvrir, bien qu’en réalité, il fut plus qu’à demi-nu, prends cette once, elle te servira à acheter un caleçon.