Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/134

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et que, Dieu me pardonne, je crois qu’il se méfie de nous !

— Oh ! cela n’est pas possible, ami ?

— Ma foi, je ne sais trop qu’en penser ; du reste je dois avouer que j’ai été peut-être un peu trop vert avec lui ; il me faisait des raisonnements tellement illogiques, que j’en étais agacé et que, malgré moi, j’ai été plus loin que je n’aurais dû le faire.

— Mais la conclusion de tout cela ?

— La conclusion ? il n’y en a pas quant à présent. Cet homme est la nature la plus singulière que je connaisse ; il hésite constamment et ne peut se résoudre à prendre une détermination.

— Cependant il faut que tout cela finisse ! nous ne pouvons pas rester continuellement exposés à être pendus au moindre soupçon. J’aime beaucoup M. le duc de la Torre, mais je n’éprouverais qu’un médiocre plaisir à être, à cause de lui, accroché à une potence. Vent-en-Panne ne peut pas non plus constamment louvoyer en vue de la ville ; fais attention que voici près de seize jours que nous sommes ici ; je suis d’avis de brusquer le dénouement.

— Brusquer le dénouement ! mais de quelle façon ?

— Il y a cent manières de terminer cette affaire.

— Passe les quatre-vingt-dix-neuf qui te semblent les moins bonnes, et dis-moi la centième.

— La centième la voici : tandis que l’un de nous restera dans la ville, l’autre sortira, s’emparera d’un canot, ou ce qui est plus simple encore, se rendra sur la côte où nous avons débarqué ; fera le signal convenu avec Vent-en-Panne, lui demandera des instructions, après s’être abouché avec lui ; et comme en résumé il est notre chef, que nous l’avons reconnu pour tel dans cette expédition nous ferons ce qu’il nous ordonnera ; et nous sortirons ainsi de cette impasse dans laquelle nous sommes, sans avoir à assumer sur nous aucune responsabilité.