Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/270

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Le capitaine Pierre Franc avait pris le commandement de la forteresse de Saint-Jean-de-Luz ; il fit pointer les canons à couler, et commença un feu terrible sur les malheureux bâtiments espagnols déjà à demi vaincus. L’amiral espagnol sommé de se rendre pour sauver les quelques hommes survivant encore, et ne le voulant pas, se fit sauter la cervelle sur son château d’arrière. Cette catastrophe amena immédiatement la reddition de l’escadre espagnole.

Les flibustiers étaient radieux ; le hardi coup de main qu’ils avaient tenté avait obtenu une réussite au-dessus de toutes leurs espérances ; déjà ils croyaient toute résistance terminée ; ils s’imaginaient être complétement maîtres de la ville, et se préparaient, selon leur coutume, à organiser méthodiquement le pillage ; lorsqu’un bruit terrible s’éleva tout à coup, et leur apprit que tout n’était pas fini encore, et qu’ils s’étaient trop hâtés de chanter victoire.

Le duc de la Torre, après avoir travaillé pendant presque toute la nuit à écrire des lettres et des mémoires pour sa défense, était descendu dans son jardin pour rafraîchir sa tête brûlante, et remettre un peu d’ordre dans ses idées, après une longue nuit d’insomnie ; lorsque les cris : Los Ladrones ! poussés à quelques pas de lui par des fuyards, parvint à ses oreilles ; ces cris lui révélèrent ce que déjà il avait presque deviné pendant ses conversations avec l’Olonnais, c’est-à-dire l’expédition résolue par les flibustiers, sous prétexte de le soustraire aux machinations odieuses de ses ennemis.

Le duc comprit toute la terrible portée pour lui du hardi coup de main tenté par les flibustiers ; la responsabilité qui lui incombait, la tache d’infamie jetée sur son honneur, sans que cette fois, il lui fût possible de se disculper, en prouvant son innocence.

Cet homme, d’un caractère si irrésolu, si faible, qui n’osait se hasarder à prendre une résolution quelcon-