Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/281

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

amener la réussite de ses projets et lui donner enfin la vengeance que depuis si longtemps il essayait d’atteindre ; lorsque, tout à coup, il fut réveillé pour ainsi dire en sursaut, et tiré de ses sombres réflexions, par les cris : los ladrones ! los ladrones ! poussés près de lui par des gens qui s’enfuyaient dans toutes les directions.

— Mille démons ! s’écria-t-il ; les flibustiers ont pris la ville !

Il regarda autour de lui pour s’orienter ; les hasards de sa promenade l’avaient sans qu’il s’en fût aperçu, conduit presque sur les quais aux environs du môle.

— C’est à la forteresse qu’il faut aller ! dit-il, si je parviens à m’y maintenir, tout est sauvé !

Il s’élança presque en courant vers la forteresse, se frayant à grand’peine un passage à travers la foule qui encombrait maintenant les rues ; la course était longue pour atteindre la forteresse ; il fallait traverser la ville dans toute sa largeur ; à peine le Chat-Tigre avait-il fait les deux tiers du chemin, qu’il s’arrêta éperdu, en proie à une violente colère ; les canons de la forteresse tournés contre la ville, venaient de lancer une volée de mitraille, tuant et blessant plusieurs personnes autour de lui. Il n’y avait plus de doutes à conserver ; non-seulement les flibustiers avaient pris la ville, mais encore ils s’étaient rendus maîtres de la forteresse ; par quels moyens ? il l’ignorait ; mais le fait était certain.

En ce moment un homme qui courait le croisa et poussa un cri en l’apercevant ; cet homme était le geôlier chef de la forteresse, le Chat-Tigre l’arrêta.

— Que se passe-t-il donc ? lui demanda-t-il.

— Pardieu ! répondit l’autre en haussant les épaules, c’est bien facile avoir, les ladrones sont dans la ville.

— Mais la forteresse ?

— La forteresse ? Eh bien ! le démon de prisonnier que vous y avez fait enfermer ; vous savez bien ?

— Oui, qu’est-il devenu ?

— Ce qu’il est devenu ? il s’est procuré des armes sans qu’on sache comment ; il y a une demi-heure il a