Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/67

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ment descendu, et cela, si bas qu’un peu plus nous arrivions au rivage.

— Vive Cristo ! voilà une bonne histoire ! fit l’étranger en riant, il n’y a que des Gallegos pour aller ainsi à l’étourdie.

— Le fait est, dit Pitrians, que nous avons agi comme de véritables innocents.

— Bon, le mal n’est pas grand ; fit l’étranger avec bonne humeur, il est facile à réparer ; êtes-vous recommandés à quelqu’un à Medellin ?

— Non, nous ne comptions pas nous y arrêter ; mais je suppose qu’il n’y doit pas manquer de tambos, ni de posadas.

— Qu’il en manque, ou qu’il n’en manque pas, ceci importe peu, dit l’étranger et ne doit pas vous inquiéter ; vous avez rencontré Pedro Garcias, mes maîtres ; il n’est pas, à la vérité, l’un des plus riches du pays, mais, caraï ! jamais un voyageur n’a frappé impunément à sa porte, pour demander l’hospitalité.

— Je vous remercie cordialement de votre offre généreuse ; mais je crains véritablement de l’accepter, malgré tout le plaisir qu’elle me fait.

— Pourquoi donc cela, s’il vous plaît ?

— Mon Dieu, nous sommes des marchands, des gens tout simples, peut-être nous vous gênerons.

— Eh mais ! répondit-il vivement, que suis-je donc moi-même, señor ? sinon un pauvre diable d’haciendero, gagnant comme vous, sa vie en travaillant. Oh ! là, vous êtes bien pointilleux vous autres, tierras a dentro ; est-ce qu’on doit jamais hésiter à accepter une hospitalité franchement offerte ? apprenez, caballeros, que nous autres costenos, nous n’agissons pas ainsi envers les voyageurs ; quand nous faisions une offre à un étranger, c’est de bon cœur, par conséquent, nous n’admettons pas de refus.

— Ne vous fâchez pas, señor ; reprit l’Olonnais en riant, la délicatesse me faisait vous parler ainsi que je l’ai fait ; votre proposition me cause le plus grand plaisir, je l’accepte avec joie !