Page:Aimard - Les rois de l'océan, 2 (Vent-en-panne).djvu/96

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joyeuse habituelle. Ses manières même dénotaient un certain embarras ; on voyait qu’il s’efforçait sans y réussir de ne pas laisser deviner quelque chose qui lui tenait au cœur.

— Soyez le bienvenu, señor don Pedro Garcias ; dit l’Olonnais en se débarrassant de sa balle et la rangeant dans un coin ; vos affaires vont-elle bien ? avez-vous obtenu les résultats que vous désiriez ?

— Oui… oui… mes maîtres, mes affaires vont bien, répondit-il en hochant la tête d’un air embarrassé ; je n’ai pas à me plaindre, tout me réussit que c’est un charme ! et pourtant vous le dirai-je, je ne suis pas content.

— Pas content ! s’écria l’Olonnais, en feignant de s’intéresser aux affaires de son hôte dont en réalité, avouons-le, il se souciait très-médiocrement ; pourquoi donc cela ?

— Mon Dieu ? c’est très-difficile à dire ; il règne en ce moment dans la ville quelque chose qui n’est pas naturel ; qui paralyse tout, sans qu’on sache à quoi l’attribuer ; vous ne vous en êtes pas aperçus ?

— Ma foi non : l’on ne précise rien ?

— Non, pas positivement ; on parle d’une voile suspecte qui a paru au large, il y a quelques jours ; on dit… remarquez bien que je ne suis qu’un écho ?

— Oh ! parfaitement ; allez toujours ; ainsi on dit ?

— Eh bien, on dit donc que cette voile, ou plutôt ce navire, n’est pas autre chose qu’un bâtiment, appartenant aux ladrones.

— Hum ! savez-vous que c’est sérieux, ceci !

— Très-sérieux ; il faudrait s’assurer au plus vite, de la réalité de ce bruit ; ajouta Pitrians en hochant la tête.

— Oui, mais voilà le difficile ; c’est que tout le monde répète ; on m’a dit, sans que personne ne dise : J’ai vu.

— Je comprends cela ; de sorte que la question se complique ?

— Oui, extraordinairement.