Page:Aimard - Par mer et par terre : le batard.djvu/332

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La marquise avait éclaté en menaces en lui montrant la lettre qu’elle avait surprise et s’en faisant une arme contre son mari ; la frayeur de celui-ci s’était changée en épouvante : il avait compris les conséquences terribles d’une révélation ; la colère l’avait aveuglé, il s’était laissé emporter par la violence de son caractère, il s’était élancé sur sa femme pour lui arracher la lettre fatale ; la marquise avait résisté, elle s’était défendue, en redoublant de menaces, de sarcasmes et d’insultes.

Alors la lutte avait commencé ; elle n’avait pas tardé à prendre des proportions déplorables. La marquise avait eu peur ; elle avait voulu appeler à l’aide, et s’était élancée vers les cordons de sonnette, que son mari, plus agile, avait tranchés avant qu’elle pût les atteindre. Malgré son épouvante, sa terreur, la marquise s’obstinait toujours à ne pas vouloir donner la lettre ; son mari rugissait, il frappait sa femme à coups redoublés pour la contraindre à la lui céder ; sans intention peut-être, il avait mal calculé ses coups : la marquise tomba et défaillit ; il la crut mortellement blessée, il se vit perdu. La pensée du meurtre entra dans son esprit ; alors il se rua sur sa femme, la frappant du pommeau d’un pistolet qui, par hasard, se trouva sous sa main. La marquise, rappelée à la vie par la violence même des coups qu’elle recevait, s’était relevée et avait voulu fuir ; alors avait commencé autour de cette chambre une poursuite effroyable, indescriptible. La marquise, sanglante, échevelée, tombant, se relevant, s’appuyant aux murs ou aux meubles, s’accrochant aux rideaux, effarée, affolée par la terreur, n’ayant plus cons-