Page:Aimard - Par mer et par terre : le corsaire.djvu/300

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– Je ne suis qu’un simple serviteur, moi, capitaine, un peon, un peu dégrossi peut-être, mais rien autre chose ; j’ai entrevu deux ou trois fois don Estremo chez mon maître, à l’époque où nous habitions le Cerro de Pasco, il y a dix ans de cela, et j’étais confondu au milieu des autres peones de la maison. Don Estremo n’a jamais daigné laisser tomber un regard sur moi ; il n’a pu en vérité me reconnaître, puisqu’il ne me connaît pas.

-Hum ! fit le jeune homme.

— La preuve que je ne me trompe pas, capitaine, c’est que je lui ai donné du feu pour allumer sa cigarette, et que nous avons échangé quelques mots de politesse, avec la plus complète indifférence ; d’ailleurs, à l’époque où j’habitais le Cerro de Pasco, je ne portais pas de barbe et j’avais les cheveux longs, au lieu qu’aujourd’hui je porte toute ma barbe et j’ai les cheveux coupés ras ; et puis, je vous le répète, il y a dix ans de cela !

— C’est juste. Malheureusement, ce n’est qu’une rencontre fortuite ; il nous sera impossible de retrouver cet homme ! Qui sait où il est maintenant ?

— Moi, seigneurie, fit-il avec un sourire je l’ai suivi de loin sans être aperçu de lui ; je l’ai vu entrer dans un tambò, où sont déposées ses marchandises. Il se fait appeler don Joaquim Muñoz ; il passe pour être un riche négociant de Mendoza ; il est arrivé à Talca depuis douze jours ; il s’occupe très-peu de ses marchandises ; il est presque toujours en courses à travers la ville et fait de longues promenades dans la campagne, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Il donne pour prétexte à ces promenades qu’il va offrir dans les chacras