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histoire des croisades ; liv. i.

cherchant en tous lieux un refuge et oubliant leurs compagnons. Les Hongrois, voyant ces champions si redoutables disparaître subitement, et s’enfuir en toute hâte, sortirent en foule avec le roi, se mirent sans retard à la poursuite des fuyards, en massacrèrent un grand nombre, firent beaucoup de prisonniers et ne cessèrent de les chasser devant eux durant la plus grande partie de la nuit. Ils firent un tel carnage des gens de pied de l’un et l’autre sexe que les eaux du Danube et de la Leytha en furent ensanglantées. Un nombre immense de ces malheureux, espérant échapper ainsi à la mort qui les menaçait de près, se jetèrent avec un courage aveugle dans les eaux du Danube, et furent étouffés par la violence des courans. Chose étonnante ! il se noya une si grande quantité de ces fuyards qu’on fut pendant quelque temps sans voir même les eaux de ce vaste fleuve cachées sous les milliers de cadavres qu’elles entraînaient. Emicon, Thomas, Clairambault, Guillaume et un petit nombre d’autres, dont les chevaux étaient encore en état de courir, se sauvèrent sains et saufs ; quelques autres aussi se cachèrent dans les joncs des marais ou dans les broussailles, ou parvinrent à s’échapper à la faveur des ténèbres de la nuit. Emicon et quelques-uns des siens reprirent la route par laquelle ils étaient venus et s’en retournèrent chez eux ; Thomas, Clairambault et plusieurs des leurs s’enfuirent du côté de la Carinthie et de l’Italie. Sans doute la main du Seigneur s’étendit sur les pèlerins parce qu’ils avaient péché sous ses yeux, se livrant sans mesure à toutes les souillures de la chair, et parce qu’ils avaient