Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/249

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éloigné. Le héros est un généreux, et de pure colère ; j’entends par là qu’il a aussi peu d’esprit que de désir ; et je force déjà le trait, comme fera la légende ; car il n’y a peut-être que des héros d’un moment. Mais aussi ce moment de l’homme est souvent mal compris ; on le manque par ceci qu’on oublie, dans la structure, le thorax, et le cœur impétueux, celui, comme dit le poète, qui se réveille à ses propres coups. Presque toujours on décrit l’homme d’après le besoin et d’après la prudence ; ce n’est que ventre et tête. On oublie la partie qui dépense, et c’est le cœur, roi des muscles, et symbole du système musculaire, qui est tout explosif. Un muscle tire comme un cheval ; il s’excite à la résistance, il s’irrite à l’obstacle ; il se tue à vaincre. Ce mouvement n’a point de raison ; il est à lui-même sa raison. Le muscle pardonne à ce qui ne résiste pas ; à ce qui résiste il est cruel ; cruel par une sorte de cruauté envers soi ; brutal par sa force. On sait