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Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/26

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rience la plus ordinaire, qui nous répète, autant de fois que nous voulons, que nous nous trompons et que nous ne sommes pas trompés. Les dieux refusent de paraître ; et c’est par ce miracle qui ne se fait jamais que la religion se développe en temples, en statues, et en sacrifices. Mais il me faut encore mettre en avant une autre idée, dont je ne développerai pas tous les replis. Ces merveilles de la religion, qui n’apparaissent jamais, sont toutes racontées. Et sur ce sujet du langage, il s’en faut bien que tout soit dit. Quand nous parlons, soit par gestes, soit par signes, nous faisons un objet réel dans le monde ; on voit le geste ; on entend les mots et la chanson. Les arts ne sont qu’une écriture, qui, d’une manière ou d’une autre, fixe les mots ou les gestes, et donne corps à l’invisible. Ce n’est pas que ces nouveaux objets, poèmes ou temples, soient faits d’autre matière que le monde. Et sans doute faudra-t-il dire que cette ambiguïté du monde, qui n’est point du