Page:Alain - Les Dieux, 1934.djvu/345

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il y a mieux à dire. Personne ne demande si les arbres ont jamais cherché un roi ; personne ne demande si le renard a parlé au corbeau. Il s’agit de comprendre à neuf une idée qui a repris vie par le conte. Si le conte nous instruit, il est vrai comme peut l’être un conte. Que je sache ou non qu’Homère a existé, cela ne change pas les beautés de l’Iliade, ni ce que l’homme en peut tirer pour la connaissance des dieux et de soi. Jésus a nommé le pharisien ; je m’y reconnais ; je m’y juge ; cette manière de dire est attachée en moi, piquée en moi comme une flèche. J’espère me tirer d’affaire en examinant d’abord si Jésus a réellement dit cela, en me disant que si Jésus n’a pas existé, ce qu’il a dit pourrait bien n’être pas vrai. C’est un essai d’ajournement. C’est une diversion qui a peut-être pour fin de rendre la religion inoffensive, je dis à ceux qui la pratiquent. Car on ne croit guère sur témoignages, et l’on amuse l’esprit à ce genre de critique.