d’autrui, croyez bien qu’il ne renonce pas à convaincre ; il s’interdit seulement d’entraîner, et ne veut obtenir qu’un libre assentiment.
Les Propos d’un Normand ont paru chaque jour dans la Dépêche de Rouen, du 16 février 1906 au 1er septembre 1914, date où l’auteur s’engagea pour la durée de la guerre. La série entière comprend 3 098 Propos.
Alain juge qu’une fois imprimée son œuvre appartient à tous. Laissés par lui maîtres d’un choix qui ne peut retenir qu’un Propos sur dix, nous voulons qu’on y retrouve tous les aspects, toutes les tendances de sa pensée, et jusqu’à ses écarts extrêmes. C’est scrupule envers l’auteur, mais envers le lecteur aussi, qui peut mieux savoir où il va, et chercher où ses objections commencent.
L’ordre nous a donné plus de peine que le choix : Tous ces articles furent écrits au jour le jour, selon l’occasion et l’humeur ; ils sont donc faits pour être lus de même, et médités chacun à part. Tels d’entre eux pourtant se répondent par-dessus des semaines, des mois ou des années ; à se trouver rapprochés, ils gagnent en clarté, en justesse, en vigueur. Plus on relit l’ensemble, et mieux on y discerne, sous l’apparente fantaisie, une liaison naturelle et sûre des idées. Devions-nous, l’ayant dégagée, la dissimuler à plaisir ? Non ; il suffit que le classement reste souple, et s’offre sans s’imposer. Libre à vous de suivre jusqu’au bout cette chaîne de réflexions, en passant des redites bien légères au compte de l’éditeur.
L’ordre est le même dans les deux Volumes ; et chacun contient donc un peu de tout, mais en proportions différentes : Les lois de la Nature, les conditions de la Science, la police de l’esprit et des passions l’emportent dans le premier, tandis que le second ouvre plus de vues sur les réalités sociales et les problèmes de l’action.