jour en Angleterre, à l’époque de sa conversion, c’est-à-dire lorsqu’il rapportait de son voyage son fameux manuscrit de 3,000 pages comprenant les Natchez, Atala et ce même René, trois romans qui n’étaient alors que des œuvres d’art et qu’il a ensuite adaptés à ses nouvelles croyances religieuses. De là la dissonance morale que produit la passion d’Atala et surtout l’incroyable histoire de René. Un catholique comme Chateaubriand n’eût jamais publié une pareille œuvre, si elle n’eût été déjà faite ; et il en eût à coup sûr retranché l’intrigue, s’il n’y eût vu précisément la cause de la mélancolie qu’il voulait peindre. Ayant vécu ce récit, Chateaubriand n’a plus songé à séparer ces deux choses et n’a pas réfléchi que son livre n’avait pas besoin de cette donnée spéciale pour être une merveilleuse étude de tristesse humaine. La preuve que René ne fut pas écrit en vue d’une apologie chrétienne, c’est que nous en trouvons la suite, plus hardie et plus maladive encore, dans les Natchez. L’histoire a été coupée en deux : un morceau a été ajusté au Génie du Christianisme ; l’autre morceau est resté dans le livre dont elle faisait primitivement partie.
En comparant René aux Mémoires on peut d’ailleurs constater combien les remaniements du Chateaubriand chrétien ont peu modifié cette poignante monographie. « A peine plus âgée que vous... » écrit Amélie à son frère. « Elle était un peu plus âgée que moi... » nous dit René. C’est