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LE VETO

Comment Louis XVI, dans ces conditions, ne se serait-il pas cru assez fort pour reprendre l’exercice de son veto ? Quand Roland insista de nouveau auprès de lui pour lui arracher son consentement aux décrets et lm remit, à cette occasion, une longue lettre comminatoire rédigée par sa femme pour lui faire peur d’une explosion terrible s’il refusait, il mit la lettre dans sa poche et, deux jours après, le 12 juin, il congédia Roland, Clavière et Servan. Il congédia de même, trois jours plus tard, Dumouriez qui lui demandait également de sanctionner et il signifia son veto à l’Assemblée le 15 juin au matin.

Lafayette appuya le geste royal par une pétition véhémente qu’il envoya à l’Assemblée le lendemain pour demander la fermeture des clubs. Adrien Duport, plus hardi encore, conseillera bientôt au roi de dissoudre aussi l’Assemblée et de s’emparer de la dictature en attendant la réunion d’une Convention, qui serait convoquée pour reviser la Constitution. En attendant, le roi choisit ses nouveaux ministres sur la recommandation de Lafayette et d’Adrien Duport : Terrier de Montciel à l’Intérieur, Scipion Chambonas aux Affaires étrangères, Lacoste à la Marine, Lajard à la Guerre, Beaulieu aux Contributions publiques et Dejoly à la Justice.

Mais, pas plus qu’il n’avait longtemps consenti à n’être qu’un automate aux mains des Girondins, Louis XVI n’entendra se livrer aux Feuillants. Il voulait seulement se servir des uns et des autres pour surnager, pour durer jusqu’à l’amivée des ennemis qui étaient ses amis. Il avait compté sans cette force nouvelle, qui s’appelait le patriotisme.