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LE DIX AOÛT

naliste Brissot avaient demandé la République après Varennes, avec l’arrière-pensée de mettre à sa tête « le héros des Deux Mondes ». Mais celui-ci s’était dérobé. Il avait eu besoin de la protection des Lameth pour faire face aux attaques des démocrates qui l’accusaient de complicité dans la fuite du roi. Ne pouvant être Washington, il se rallia à la monarchie, et le parti républicain aristocrate qui s’était formé derrière lui disparut subitement. Les républicains démocrates, qui avaient protesté, autour de l’avocat Robert et du publiciste Nicolas de Bonneville, contre la réintégration de Louis XVI, disparurent à leur tour dans la répression dite du Massacre du Champ de Mars.

Robespierre, qui s’était défié de la République de Brissot et de Lafayette et qui professait d’ailleurs que les formes politiques sont assez indifférentes pourvu que la Constitution garantisse les libertés fondamentales et que la question sociale passe au premier plan, Robespierre n’avait cessé, depuis le début de la Législative, de répéter avec insistance que la Constitution de 1791 suffisait à résoudre tous les problèmes, même celui du veto. Il reprochait aux Girondins de n’avoir pas su utiliser toutes les ressources de cette Constitution. Il faisait allusion aux clauses qui concernent l’obligation du contreseing des ministres, leur mise en accusation devant la Haute Cour, l’abdication du roi enfin, au cas où il n’opposerait pas à l’ennemi des forces suffisantes. C’est seulement le 11 juillet, dans son discours prononcé aux Jacobins le jour même de la proclamation de la Patrie en danger, et le même jour une adresse aux Fédérés, que Robespierre conseilla nettement de prononcer la déchéance du