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LA VALLÉE DE L’HUMILIATION.

— Pas beaucoup ; je vous donne ma part. Voici votre argent ; je n’en ai pas beaucoup ; ainsi faites-le durer le plus longtemps possible.

— Oh ! merci. Que vous êtes donc heureuse, ma bonne Meg, d’avoir de l’argent de poche ! Je vais m’acquitter et aussi me régaler ; je n’ai pas mangé un seul sucre d’orge cette semaine, parce que je n’aimais pas en accepter quand je ne pouvais pas les rendre. »

Le lendemain, Amy arriva en classe un peu en retard, mais portant un petit paquet enveloppé de papier brun, qu’elle ne put s’empêcher de montrer à ses compagnes, avec un orgueil pardonnable, avant de le cacher dans les profondeurs de son pupitre. Aussitôt la rumeur qu’Amy Marsch avait vingt-quatre délicieux sucres d’orge à la menthe (elle en avait mangé un sur sa route) circula dans « sa bande », et les attentions de ses amies devinrent accablantes. Katy Brown l’invita immédiatement pour sa prochaine réunion ; Mary Ringoley insista pour lui prêter sa montre, et Jenny Snow, une jeune fille satirique, qui avait bassement jeté au nez d’Amy, la veille encore, qu’elle n’avait jamais de bonbons, enterra promptement le différend et offrit à Amy de faire un échange. Mais Amy n’avait pas oublié les remarques piquantes de miss Snow sur « les personnes dont le nez n’était pas trop petit pour sentir les sucres d’orge des autres et celles qui n’étaient pas trop orgueilleuses pour en demander », et elle détruisit immédiatement les espérances de cette « petite Snow » par le télégramme suivant : « Votre politesse n’a plus de mérite, nous ne ferons aucune affaire ensemble. »

Un personnage distingué venant à ce moment visiter la pension, les belles cartes, bien dessinées par Amy, reçurent des louanges qui envenimèrent l’âme de son