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LE CAMP DE LAURENTZ.

arrivait un orage, il ferait un parapluie très commode pour toute la société. Kate paraissait étonnée des manières de Jo, surtout lorsque, prenant sa rame, elle s’écria : « Christophe Colomb, priez pour nous ! » et lorsque Laurie, lui ayant marché sur le pied, lui dit : « Vous ai-je fait mal, mon cher camarade ? » Mais, après avoir mis plusieurs fois son lorgnon pour mieux examiner cette bizarre jeune fille, miss Kate décréta qu’elle était originale, mais instruite, et lui sourit de loin.

Meg, dans l’autre bateau, était parfaitement placée vis-à-vis des rameurs qui l’admiraient tous les deux, déclarant qu’elle se détachait très heureusement dans le paysage. M. Brooke, dont nous aurons à parler plus d’une fois, était un jeune homme grave et silencieux, qui avait de beaux yeux bruns et une voix agréable. Ses manières tranquilles plaisaient à Meg, et elle le regardait comme une encyclopédie vivante. Il ne lui parlait jamais beaucoup, mais la regardait souvent, et au fond de son cœur elle était sûre qu’il ne la regardait pas avec aversion. Ned, étant au collège, prenait naturellement tous les airs que les collégiens se croient obligés de prendre ; il n’avait pas beaucoup de sagesse, mais était très gai et d’un très bon caractère ; enfin, c’était un petit personnage très à sa place pour un pique-nique. Sallie Gardiner était très occupée à préserver de toute tache son immaculée robe de piqué blanc et à gronder Fred qui, par ses mouvements désordonnés, menaçait de faire chavirer le bateau et terrifiait la pauvre Beth.

La grande prairie n’était pas loin de la maison de M. Laurentz. En y arrivant, on trouva la tente plantée et les ustensiles de crocket disposés sur un terrain uni et couvert de fin gazon. La troupe joyeuse débarqua