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Page:Alessandro Manzoni - Les fiancés, trad. Montgrand, 1877.djvu/265

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gauche du crucifix. On regarde en haut ; à Milan, il faut le dire, la crainte de Dieu n’est pas éteinte. Tous sont rentrés en eux-mêmes. Le plus grand nombre, veux-je dire. Il y avait bien certains démons qui, pour voler, auraient mis le feu même au paradis ; mais, voyant que le peuple n’était pas de leur sentiment, ils ont été contraints de renoncer au projet et de se tenir tranquilles. Devinez maintenant qui l’on a vu tout à coup paraître. Tous nos seigneurs[1] du Duomo, en procession, la croix levée, en habit de chœur ; et Mgr Mazenta, archiprêtre, s’est mis à prêcher d’un côté, et Mgr Settala, pénitencier, de l’autre, et les autres de même : mais, braves gens, que voulez-vous donc faire ? mais est-ce là l’exemple que vous donnez à vos enfants ? mais retournez chez vous ; mais ne savez-vous pas que le pain est à bon marché, plus qu’auparavant ? mais allez voir, l’avis est affiché au coin des rues.

— Était-ce vrai ?

— Diable ! voudriez-vous que nos seigneurs du Duomo fussent venus en grande chape pour dire des chansons ?

— Et le peuple, qu’a-t-il fait ?

— Peu à peu on s’en est allé ; on a couru au coin des rues : et qui savait lire y a vu bien véritablement la taxe. Devinez : un sou le pain de huit onces.

— Comme c’est beau !

— La vigne est bien fleurie ; pourvu que ça tienne. Savez-vous combien de farine ils ont fait perdre entre hier et ce matin ? De quoi nourrir le duché pendant deux mois.

— Et pour le dehors, n’a-t-on fait aucune loi un peu bonne ?

— Ce qui s’est fait pour Milan est tout aux frais de la ville. Quant à vous

  1. En plusieurs villes de l’Italie les chanoines ont le titre de monseigneur et presque le costume d’évêque.