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DONATELLO.

concordent pas pour que ce soit le portrait de ce personnage dont l’histoire d’ailleurs ne se soucie plus guère.

Quel que soit donc son nom, l’homme étudié dans ce buste fut le prétexte d’un morceau prodigieux, d’une apparition de nature presque inquiétante. Pourtant il nous touche infiniment moins que les œuvres de Donatello où sont unies la beauté d’exécution et l’invention imprévue, telles que ce merveilleux David. Il nous faut non seulement la main de l’artiste, mais encore son cœur. Ce buste d’homme, c’est son observation ; le David, c’est son rêve.

Pareil jet de verve éblouissante, pareille perfection d’exécution règnent dans la joviale petite statue de Cupidon ou de Mercure, ce délicieux « voyou » florentin, qui se moque de tout, avec le cynisme d’un jeune dieu, avec le débraillé d’un petit prince débauché.

Ce sont de telles inventions qui donnent à notre maître une place si unique dans l’art, parce qu’elles unissent à la vivacité de l’imagination, à l’impression de surprise qui s’enfonce en vous comme la flèche lancée par ce diabolique et charmant archer, le prodige d’un métier incomparable, d’une science certaine, d’une main si souple et si ferme qu’elle peut caresser toutes les subtilités ou planter comme un roc toutes les vigueurs. Certains ont la science et la technique. Ils sont froids. Certains n’ont que l’imagination et l’intention exquises. Ils faiblissent. Donatello a tout.