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DONATELLO.

pas moins la marque de cette passion, de cette âpre flamme, qui avaient agité et dévoré l’âme paternelle. Ce sont des traits, j’allais écrire des vérins, qui se transmettent avec l’éducation et avec le sang lui même.

Mais la vocation artistique est le grand, l’absolu dérivatif à toutes les passions héréditaires. Elle les absorbe, les assimile, les transforme. De ce qui était chez un ascendant de la fureur d’action, elle fait, chez l’héritier, une furie de création. Il n’est jusqu’aux imperfections dont elle ne fasse des marques, et jusqu’aux vices qu’elle ne reforge en originalités.

Il n’y a pas plus de génération spontanée dans l’ordre intellectuel que dans l’ordre physiologique. Il n’y a que des adaptations différentes de facultés transmises, mais les résultats, à première vue, semblent tellement divers qu’il faut réfléchir pour comprendre, par exemple, comment les facultés de conspiration chez le vieux et violent Niccolo deviennent, chez le petit Donato, des aptitudes à la composition ; comment une âme chez l’un agitée jusqu’aux impulsions de meurtre, se satisfait, chez l’autre, en accentuations farouches, en expressions troublantes ; comment la rude abnégation du père qui, malgré condamnations et exils, recommence sans cesse à se sacrifier à son idée, devient, chez le fils, cette merveilleuse continuité dans la besogne, et ce sublime dédain du bien-être. Ce sont là maints signes que nous verrons reparaître à chaque instant, soit dans la vie, soit dans l’œuvre de Donato. Sans faire reposer toute esthétique sur l’hérédité, il est également impossible de