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DONATELLO.

Donatello fit encore pour les niches extérieures d’Or San Michèle un Saint Georges d’une apparence toute différente, mais qui, mieux examiné, est de la même trempe, et qui possède, nettement gravé, ce que l’on nous permettra d’appeler l’air de famille. À le voir tout d’abord, c’est une juvénile et presque gracieuse figure. Comparé aux rudes barbons que sont les apôtres, on serait tenté de voir en lui un enfant aimable, une sorte de Daphnis revêtu par caprice de la cuirasse et des jambières, et s’appuyant sur un bouclier pour jouer quelque délicieuse comédie. Voyez-le de nouveau : c’est un adolescent farouche, à l’attitude déterminée, au front non moins sourcilleux que celui de saint Marc, aux mains fortes et rudes. S’il parlait, ce ne serait pas avec la voix musicale de l’enfance, ce serait avec le timbre enroué et grave de la mue. Il est campé sur ses jambes écartées, comme dans la position de garde. C’est un guerrier sans cesse en éveil. Ce bouclier tout uni, coupé seulement d’une simple et effrayante croix, n’est pas un jouet. Cet être beau et jeune ne plaisante jamais. « Il paraît vivant et dans sa tête on reconnaît la beauté de la jeunesse, le courage militaire et une fierté vraiment terrible ; il a une attitude si merveilleuse qu’on dirait qu’il va se mouvoir. Certes, dans aucune œuvre moderne, on n’a encore vu autant de mouvement et d’animation que la nature et l’art en mirent dans celle-ci par la main de Donato. » Cette dernière citation est de Vasari. Vraiment on ne saurait mieux dire, et on préférera à tout le jargon de l’esthétique