Page:Alexandri - Les Doïnas, 1855.djvu/130

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

mille volontaires, pour reconquérir le trône qu’il n’eût jamais perdu sans la trahison des boyards. Il était, en outre, porteur d’un ordre du sultan enjoignant au khan des Tartares Nogais de lui donner autant de troupes qu’il en aurait besoin.

Lapuchneano cheminait ayant à ses côtés le vornic Bogdan ; l’un et l’autre, montés sur des étalons turcs, étaient armés de pied en cap.

« Eh bien ! Bogdan, dit après un court silence Lapuchneano, penses-tu que nous réussirons ?

— N’en doutez point, monseigneur, répondit le courtisan. Le pays gémit sous l’oppression de Tomche ; l’armée qu’il commande n’attend pour se rendre à nous que la promesse d’une augmentation de solde. Quant au petit nombre de boyards auxquels il a laissé la vie, la crainte seule de la mort les retient dans l’obéissance ; mais dès qu’ils vous verront venir à la tête de forces considérables, ils abandonneront Tomche pour passer sous vos drapeaux.

— Fasse le ciel que je ne sois pas forcé d’agir comme l’a fait Mirce le voëvod chez les Munteni[1] ! Je te l’ai déjà dit, je connais les boyards, pour avoir vécu longtemps parmi eux.

— Grande est la sagesse de Votre Altesse. »

Pendant ce dialogue, ils étaient arrivés près de Tekoutsch ; ils firent halte dans un bosquet.

Un aprode[2] parut devant Lapuchneano.

« Seigneur, lui dit-il, des boyards viennent d’ar-

  1. Les montagnards, nom que les Moldaves donnent aux Valaques.
  2. Espèce de gendarme.