Enfin, le jour delà première, après avoir apporté une cinquantaine de voix de vieux différentes, il en produisit une, pas encore entendue, et plus mauvaise que toutes les autres.
Malgré l’interprétation, la pièce alla jusqu’au bout, et sans être sifflée. Un succès de première, en somme ! mais un succès refroidi par le comique sinistre du troisième acte, où la maladie et la mort, intervenant au milieu d’une farce, composent une mixture dont les spectateurs de Shakespeare et de Ben Jonson eussent goûté l’amertume profondément philosophique, mais que la moyenne du public du premier soir goûta peu et comprit moins encore. Quant à la critique, elle se montra plus sévère que pour Thérèse Raquin. En quatre lignes peu polies, le critique ordinaire du Figaro exécuta l’œuvre, selon lui repoussante, ennuyeuse et immorale. Les plus bienveillants dirent à l’auteur « Thérèse Raquin, au moins, avait certaines qualités : faites-nous une autre Thérèse ! » Les autres lui interdisaient à jamais les planches comme à une brebis galeuse, comme à un paria suspect et louche qui ne pourrait dorénavant que les encanailler. Au demeurant, les Héritiers Rabourdin ne furent joués que dix-sept fois. Deux ou trois soirs, le dimanche, la pièce fit quelque argent : c’était le bon populaire du quartier, qui, lui, paraissait comprendre et riait beaucoup. Mais, les autres soirs, la salle resta presque vide : le grand public ne se dérange pour aller à Cluny que si la