J’ai l’air, depuis un moment, de raconter des choses étranges. C’est que, depuis un moment, je touche à l’histoire et à la politique. Il faut se reporter à l’affolement de cette époque, pour bien reconstruire l’état psychologique dans lequel se trouvait notre romancier. Il m’a souvent parlé de cette minute de sa vie : — « Je m’imaginais que c’était la fin du monde, qu’on ne ferait jamais plus de littérature… J’avais emporté de Paris le manuscrit du premier chapitre de la Curée, et je l’ouvrais parfois, comme j’aurais ouvert des papiers très anciens, qui ne seraient plus que des souvenirs. Paris me semblait reculé, perdu dans les nuages. Et, comme j’avais avec moi ma femme et ma mère, sans aucune certitude d’argent, j’en étais arrivé à croire tout naturel et très sage, de me jeter les yeux fermés dans cette politique que je méprisais si fort quelques mois auparavant, et dont le mépris m’est d’ailleurs revenu tout de suite. »
Me voici donc arrivé à la fameuse histoire de la sous-préfecture de Castel-Sarrazin dont on a voulu écraser Zola ; car, ce ne fut pas même une préfecture, mais une sous-préfecture, qu’on finit par lui offrir. Il avait d’abord été question d’Auch, puis de Bayonne ; enfin, Clément Laurier fit appeler un jour notre ambitieux d’occasion et lui expliqua que le gouvernement avait besoin, à Castel-Sarrazin, d’un sous-préfet à poigne et à la plume facile, qui put enlever une élection par des proclamations vigoureuses ;