Page:Alexis - Émile Zola. Notes d’un ami, Charpentier, 1882.djvu/229

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tiennent toute la largeur du macadam, entre le Vaudeville et le faubourg Montmartre. Mais, tout comme au temps de Racine, « ils ne veulent pas dire un mot sans plaisanter, » et leurs « basses affections » — aujourd’hui leurs mots — sentent plus l’estaminet que la bonne compagnie. Enfin, dans deux cents ans d’ici, si des fureteurs déterrent leur nom oublié, on ne saura pas davantage le titre de leurs livres, qu’on ne connaît aujourd’hui un certain « Comte de Gabalis, » laissé par l’éreinteur de Racine.

Heureusement que le public, le grand public, qui achète, lit et juge en dernier ressort, se trouve derrière la critique, légère ou solennelle. C’est lui qui dédommage tôt ou tard les créateurs de l’aveuglement et de la mauvaise foi. C’est lui qui finit toujours par aller aux audacieux, aux novateurs, aux originaux. Seulement, trompé par la critique courante, égaré par les médiocres qui se donnent la mission de le guider, le public a besoin parfois d’un temps très long pour casser les arrêts injustes et mettre définitivement chaque chose en sa place. Les malveillances tombent d’elles-mêmes un jour ; mais ce jour peut arriver si tard, que. les victimes en soient découragées ou mortes.

De la part du public du livre surtout, cette justice est parfois très lente à venir. Voici comment les choses se passent presque toujours. Un écrivain original, apportant une note à lui, naît et débute. Son premier, son second, son troisième effort, restent