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Page:Alexis - Émile Zola. Notes d’un ami, Charpentier, 1882.djvu/253

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Et vers le nôtre aussi chacun porte la main.
Toute vertu d’ailleurs étant coquetterie,
La pudeur, une aimable et tendre hypocrisie,
Les femmes, voyez-vous, ne valent pas vraiment
La légère vapeur que l’on fait en fumant.
Les aimer, camarade, ah ! la sotte manière !
En user et changer, voilà comme il faut faire !
Les aimer ! mais ce mot n’est qu’un vieux mot perdu.
Les siècles ont marché, l’âge d’or est venu.
On n’aime plus Rodolphe, on possède une femme.
En se jouant parfois on lui déchire l’âme.
Un jour vient où le cœur finit par se blaser ;
Ce jour-là, sur le front on lui donne un baiser ;
Tandis qu’elle murmure à votre cou : « Je t’aime, »
On dit : « Pour moi, ma chère, il n’en est pas de même,
« Car je ne t’aime plus ; vois la porte plus loin. »
Et, comme un vieux soulier, on la jette en un coin.
Il est vrai que la femme a fini par comprendre
Que le feu le plus pur fait toujours de la cendre,
Et qu’il était stupide et risible, en effet,
De donner de l’amour plus qu’on n’en demandait.
Elle a fait comme nous.
Elle a fait comme nous.Oh ! Seigneur, votre monde
Me paraît, dans cet âge, être un cloaque immonde.
L’Amour, cet esprit saint, ce frère d’Ariel,
Qui venait nous conter les voluptés du ciel,
Est remonté vers vous, trouvant que, sur la terre,
L’homme se ressent trop de la fange, sa mère.