Page:Alexis - Émile Zola. Notes d’un ami, Charpentier, 1882.djvu/273

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Un instant oubliée au bras de quelque dieu,
Et je ne suis pas né de son baiser de feu.
Tu n’as jamais pour moi dénoué ta ceinture ;
Tu ne m’enfantas pas sur l’épaisse verdure,
Blanche Provence, à l’heure où ton soleil brûlant
D’un long frisson d’amour précipite ton sang.
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Mais, si je suis enfant d’un ciel triste et brumeux,
Nymphe, bien jeune encor, je vis briller tes yeux ;
Et, courant m’échauffer au duvet de tes ailes,
Avide, je suçai le lait de tes mamelles.
Et toi, mère, indulgente et le sourire au front,
Tu ne repoussas pas ce frêle nourrisson ;
Au bruit de tes baisers, tes bras, dans la charmille,
Me bercèrent parmi ta céleste famille,
Et ton regard d’amour fit glisser dans mon cœur
Un reflet affaibli de ta sainte splendeur.
Ah ! c’est de ce regard que moi, l’enfant de l’ombre,
Je vis un astre d’or remplacer ma nuit sombre,
Et sentis de ma lèvre un souffle harmonieux
S’échapper en cadence et monter dans les cieux.
C’est de lui que je tiens ma couronne et ma lyre,
Mon amour des grands bois, des femmes et du rire ;
C’est lui qui m’indiqua les sentiers immortels
Que suivirent jadis tes jeunes ménestrels.
Et, devant ce présent de joyeuse science,
Bien souvent je regrette, ô ma blanche Provence,