Page:Alexis - Émile Zola. Notes d’un ami, Charpentier, 1882.djvu/60

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dans l’échelle des êtres, « l’Homme de l’avenir » l’Homme devenant Dieu. Je n’étonnerai personne en révélant ici que le jeune poète, aux plans si audacieux, n’écrivit jamais de la Genèse que… les huit premiers vers ! D’ailleurs, les voici tous les huit, tels que je les ai retrouvés sur une vieille feuille de papier jaunie :

 
LA NAISSANCE DU MONDE
  
I

Principe créateur, seule Force première,
Qui d’un souffle vivant souleva la matière,
Toi qui vis, ignorant la naissance et la mort,
Du prophète inspiré donne-moi l’aile d’or.
Je chanterai ton œuvre et, sur elle tracée,
Dans l’espace et les temps je lirai ta pensée.
Je monterai vers toi, par ton souffle emporté,
T’offrir ce chant mortel de l’immortalité.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .


Toute une vie, un travail de bénédictin, un souffle poétique extraordinaire nourri par une universalité de connaissances, voilà ce qu’il eût fallu pour une pareille tâche. Et encore une besogne aussi héroïquement synthétique était-elle faisable dans notre siècle de transition et d’analyse, où les grandes inventions aux conséquences encore inconnues se multiplient, où le progrès marche par bonds, où la vérité d’hier soir n’est plus celle de ce matin ? Néanmoins, je trouve attendrissant ce garçon de vingt et un ans, qui n’a pas de pain, et qui se plonge d