Page:Alexis - La Fin de Lucie Pellegrin, etc, 1880.djvu/125

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
113
L’INFORTUNE DE MONSIEUR FRAQUE

— Pour la composition en récitation, dont tu n’as pas parlé, il te reste trois semaines ; et tu as une excellente mémoire… Nous nous y mettrons, ton père et moi, pour te faire répéter nuit et jour ; tu ne feras plus autre chose. Moi, s’il le faut, j’apprendrai avec toi, tout : Athalie, le Petit Carême, même les Géorgiques et ton Jardin des racines grecques. Enfin (et ici elle le regarda bien dans les yeux), à partir d’aujourd’hui, tu nous demanderas tout ce que tu voudras…

Le fils Menu sauta en bas du lit, souriant d’une joie maligne. Tout en passant ses habits, il imposait déjà des conditions. Il voulait pour son premier déjeuner du racahout au lait, avec des tartines de beurre étendu sur du pain grillé. Jusqu’au jour de la composition en récitation, il ne retournerait pas au collège : son père le porterait comme malade sur les billets d’absence. Il consentait bien à apprendre par cœur de la prose et des vers une grande partie du jour ; mais il aurait ses soirées libres, sortirait seul après le dîner, rentrerait vers minuit avec un passe-partout, « comme s’il était déjà étudiant ». Enfin, et surtout, on lui donnerait de l’argent.

Trois semaines plus tard, le mardi de la récitation, Eudoxe arriva au collège à sept heures moins dix, en fumant la cigarette, une badine sous le bras, les mains dans les poches. Au grand ébahissement de M. Charboneau et de toute la classe, il débita tout ce que le sort lui désigna, le français, le latin, le grec,