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LA FIN DE LUCIE PELLEGRIN

Enfin, elles s’étaient arrachées de chez Victor. À quelques pas de la porte, sur toute la largeur du trottoir déjà à l’ombre, elles se tenaient debout, hésitant encore à se quitter, lorsque Miss, qu’elles avaient laissée endormie sur sa chaise, sortit à son tour de chez le marchand de vins. De son gros ventre, balayant presque le macadam, avec sa démarche accablée de chienne qui va mettre bas. Miss vint les rejoindre, en remuant la queue.

— Pauvre Miss, fit Héloïse, tu ne veux pas qu’on s’en aille sans toi, dis !

C’est en revoyant ainsi la chienne de Lucie Pellegrin, qu’une vague pitié, — qui les fit soudain se baisser toutes ensemble, pour caresser Miss, au milieu du trottoir, — remonta de la chienne vers sa maîtresse. Elles en reparlèrent. La Pellegrin devait décidément être morte, puisque Miss se traînait ainsi comme une âme en peine.

Tout à coup, la grande Adèle fit une découverte.

— Miss n’a plus son collier… vous savez, son collier avec une L et un P en argent ?

Alors elles se regardèrent toutes quatre.

— Ce n’est qu’à deux pas… la rue Frochot… insinua Héloïse.

Chacune avait compris, et consentait tacitement.

— Viens, Miss, dit seulement la grande Adèle.

Et elles se mirent en route avec la chienne.

— Si elle est morte, ajouta en marchant l’autre