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JOURNAL DE MONSIEUR MURE.

ne reçoit personne, se faisant monter ses repas deux fois par jour, et ne sortant presque jamais. « Alors, c’est bien, j’arrête la chambre et vais vous payer d’avance la première quinzaine. » Nous descendons au bureau. On me passe le registre. Et je reconnais une ligne de l’écriture d’Hélène : Madame Hélène, veuve, née… Au lieu de Derval, elle avait écrit : Valder. Je m’inscris à la suite. Et je pars pour aller chercher mes malles. Une heure après, j’étais de retour. Et me voici installé chambre 7, à côté d’Hélène.


13 mai.

Je me sens à la fois bien triste et bien heureux. Depuis vingt-quatre heures, c’est une grande douceur de vivre ainsi dans l’atmosphère d’Hélène. Elle est là, à deux pas de moi, sous ma protection. La cloison est mince. Si elle ouvre sa fenêtre, si elle marche, si elle tousse, je l’entends. Hier soir, vers minuit, quand elle s’est mise au lit, le sommier a gémi. Et ce matin, Philippe, le garçon, que j’avais sonné, n’arrivant pas, j’entr’ouvre ma porte : devant la sienne, j’aperçois ses bottines, de jolies petites bottines en peau de gant. Ma foi ! je n’ai pu me retenir, je suis allé les toucher. Je les ai presque embrassées, toutes crottées de la boue de la veille.

C’est qu’il pleuvait, hier soir ; une pluie épouvantable, fouettant les vitres si fort que ma nouvelle