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LA FIN DE LUCIE PELLEGRIN

yeux, ses grands yeux enfoncés, luisant davantage, d’une voix plus aiguë et sifflante :

— Sur le balcon, vous vous imaginiez que je dormais ; mais j’entendais tout, et je ne vous aurais pas laissé partir ainsi, pour sûr… S’il l’avait fallu, je vous aurais poursuivies, en chemise, dans l’escalier… Comme aussi, quand la tante était là avec le petit, vous n’auriez pas pu filer, soyez tranquilles, je tendais l’oreille…

Toutes riaient de si bon cœur, que pas une ne sembla remarquer que Lucie s’interrompait cette fois pour tousser et cracher dans son mouchoir.

— C’est une bonne fille, n’est-ce pas ? disait madame Printemps, aux anges, sucrant déjà son troisième grog.

— Oui ! oh oui ! une bien bonne fille, répétaient les autres avec un commencement d’enthousiasme.

— Une vraie amie…

— Une camarade que nous ne laisserons pas s’ennuyer…

— Et il va falloir qu’elle guérisse bien vite, dit Héloïse.

— Moi ! d’abord, s’écria la grande Adèle, à partir d’aujourd’hui, je viens te soigner toutes les après-midi !

Quand Lucie Pellegrin eut fini de tousser, encore la larme à l’œil des efforts qu’elle venait de faire, elle but ce qui restait de son absinthe, et, avec une exaltation croissante, d’une voix forcée et suraiguë :